08 avril

« César et Rosalie »… 1972… Romy Schneider… Incarnation suprême du don de soi. Sans contre don. Se donner jusqu’à se perdre… de trop aimer… de trop sentir… ressentir… il suffit de regarder et regarder encore « Max et les ferrailleurs »… « L’important c’est d’aimer »… ou encore « L’enfer ».. Certains me diront « La piscine »… d’autres.. « Les choses de la vie »… et « César et Rosalie »… inlassablement…

Pourquoi aborder Romy Schneider ? c’est sans utilité apparente… finalement cela me regarde si je voue une admiration profonde et sans faille pour cette artiste qui m’a profondément et durablement marqué… 

Pourquoi… ? parce qu’en somme ma rencontre avec Romy Schneider, c’est un peu ce qui construit parfois nos vies… à plusieurs niveaux… Je n’aime pas « Sissi ». Il a fallu que je dépasse mes appréhensions concernant Romy Schneider. Un peu comme les marques que l’on met sur les gens… sur les films… sur les situations sociales… comme nos enfermements… Tant de choses ne s’ouvrent plus à nous… perdus dans nos certitudes… nous nous obligeons à jouer nos rôles dans un théâtre… et « Sissi », c’était trop de facilité… de sensiblerie… trop peu de rigueur… surtout pour un garçon d’une dizaine d’années dans les années 80… Et pourtant « Sissi », c’était Romy Schneider… 

Erving Goffman ne dit pas autre chose fin des années 50 dans son ouvrage « La mise en scène de la vie quotidienne »,  traduit seulement dans les années 70, où l’individu dans la vie quotidienne est vu par Goffman comme un acteur en représentation, et où il doit maîtriser ses actions, sa vie en somme, par des procédés de mise en scène. L’individu joue un rôle chaque jour, ou des rôles selon les situations, comme dans une pièce de théâtre ou un film[1]… 

Et donc, déjà si tôt, nous sommes dans nos carcans… nos rôles… violents… sans même nous en rendre compte… sans blâmer personne… c’est le « jeu »… 

Alors Romy Schneider… c’est l’explosion… on peut être « Sissi » et être « Rosalie »… Romy Schneider… c’est aimer… le goût des autres… c’est dépasser les clivages… c’est casser les codes… c’est ne pas s’enfermer… certains diront qu’elle s’est enfermée après dans des rôles plus dramatiques… toujours un peu les mêmes… tellement réducteur… c’est pour cela que j’aime tant « César et Rosalie »… comédie romantique ultime qui ne dit pas son nom… où elle maîtrise le jeu… elle n’est pas la maîtresse, comme dans « Les choses de la vie »… elle n’est pas celle qui fait tomber, comme dans « Max et les ferrailleurs »… elle est celle qui donne la vie, qui ouvre aussi vers des possibilités d’amour… sans frontières… avec passion… sans se perdre… en se respectant… Sami Frey et Yves Montand n’étant plus là que pour accompagner, dans la douceur de l’un et l’exubérance de l’autre, la place centrale de son être… exceptionnel… 

Finalement, si je voulais tant parler de Romy Schneider, c’est aussi qu’elle donne vie à la vie… sans concessions… jusqu’au geste ultime qu’elle s’est donné… qui est la vie… même si…  parce qu’elle estime que sans amour, sans partage profond, authentique, sans acceptation de ce que nous sommes, pour soi-même, et dans le regard des autres, dans cette pièce que nous jouons tous les jours, il n’y a pas ou plus lieu d’être… 

Parce qu’au fond…. comme un pas de danse… en toile de fond… quelques notes… «Caravan of love »… et dans vos bras, l’être aimé… votre amoureux(se)… vos enfants… vos ami.es… son regard… et le vôtre… profondément… être là… sans concessions… être là… et l’amour qui y est mis… toujours l’amour… rien que l’amour…

Prenez soin de vous… <… et des âmes et des corps que vous aimez …>


[1] Goffman E., La mise en scène de la vie quotidienne. 1. La présentation de soi, Les éditions de Minuit, 1973