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14 avril 2024

[Parenthèse 32… ]

{ Le soleil avait illuminé la journée d’une chaleur retrouvée. L’automne s’était écoulé depuis plusieurs mois déjà, laissant l’hiver hiberner dans des steppes très éloignées. Les nappes phréatiques des contrées s’engourdissaient d’un repas gargantuesque, repues s’imaginant craintivement que ces quelques rayons auguraient de moments moins charmants pour les terres profondes qui nourrissaient les corps des sociétés, mêmes les plus cachées.

Les quelques tables bénéficiaient d’un léger vent souverain, permettant d’humer les barbecues qui flambaient des morceaux de viandes grillés, parfois légèrement cramés. Les corps commençaient à arriver. Les uns inspectant si les autres étaient déjà arrivés. Le changement de temps marquait les peaux de certains d’un léger rouge chauffé à blanc alors que d’autres voyaient déjà le brun hâlé s’installer. Les premières bières arrivaient. Fruitées, ambrées, brunes ou blondes, elles se mélangeaient dans les gosiers. Les rires plus prononcés définissaient un moment d’abandon. « Cortez, The Killer » par Dave Matthews Band, distillait une ampleur rock à cet été précoce et printanier.

Un peu à l’écart, il s’était installé, humant cette ambiance avec douceur. Il était arrivé à l’avance, comme d’habitude, et ce depuis plus de 30 ans. Les cheveux poivre et sel et les rides qui marquent son visage laissent paraître que la moitié du chemin s’annonce grandement. Les enfants sont des adultes, qui restent ses enfants. Il comprend mieux maintenant certaines phrases de ses parents quand il passait chez eux et qu’ils débattaient sur le temps. Au même moment, « Ain’t talkin’’bout love » de Van Halen s’immisce dans les silences temporaires des conversations. Il commande une assiette mixte de fromage et de charcuterie, et puis une « 1030 ». Il pianote sur son smartphone. Le RWDM finira peut-être par se sauver. Vanderpoel gagnera certainement demain. Il sourit. 

En arrivant, il n’avait pas vu la table dans le coin sur l’arrière de la terrasse. Il retire son casque, dépose son vélo contre le poteau, les emplacements sont encombrés comme un carrefour Léonard un soir d’été ou d’un quotidien énervé. Il appelle et s’arrête dans son élan. Il sent une petite tape sur son épaule. Ils se prennent dans les bras. Ils rigolent. Ils ne l’ont toujours pas vu. Lui, il les observe. Il se dit qu’il a de la chance de les avoir rencontrés sur son chemin. Il manque encore deux larrons. Ils ont vieilli. Ils se voient encore écumer les bars de Louvain-la-Neuve. Une respiration. Perdu dans ses pensées, il sent deux baisers se poser sur ses joues. Il sourit. Il retire discrètement ses lunettes, frotte ses yeux, pose sa main sur la cuisse de l’un et invite l’autre à prendre un morceau sur la planche posée là. Au fond, il croit entendre les notes mélancolique et pop de « Teenage Summer » de Crowded House. Il commande une nouvelle tournée. Le soleil descend lentement, la nuit se pose délicatement. La vie s’égrène patiemment. Ils s’aiment et se le rendent bien, profondément…}

[Prenez infiniment soin de vous…et de ceux que vous aimez… ]