Dans le débat actuel, je suis toujours étonné du peu de regard critique, à quelques exceptions, du système et du modèle économique mis en place. Souvent, nous entendons parler de « modernité », « d’avancement », du « 21ème siècle ». Truc et astuce de communication. Sans plus. D’une vérité qui frise l’absurdité tellement elle nous prend pour des cons. Mais sans doute le sommes-nous un peu. Beaucoup même puisque nous pouvons avoir tendance à le croire. Il n’y a rien de moderne ou d’avancée dans le 21ème siècle dans l’idée de flexibilité ou de passage à 45h possible. Il y a juste une adaptabilité du marché du travail aux conditions sociales et économiques des pays qui n’ont aucune régulation sociale ou protection sociale. On cite souvent les pays émergents, notamment l’Inde. A se demander si certains ont déjà été voir les conditions de travail des indiens. Je ne parle pas des cadres mais de tous les autres. Vivre toute une famille entière, de plusieurs générations et de plusieurs branches, parce que bas salaires et flexibilité totale des horaires nécessitent de construire des bricolages institutionnels familiaux pour survivre. On parle de la Chine aussi. Oui. La Chine. Cette démocratie florissante, qui permet aux individus de pouvoir déterminer ce qui leur semble intéressant ou pas dans leur vie. J’entends.
Autre cas. L’Allemagne. Le taux de pauvreté de la population ne cesse d’augmenter au rythme où les mesures de protections sociales sont laminées. C’est un modèle. Ce sont des modèles. Je sais, j’entends déjà. Nous ne sommes pas comme eux. Je ne sais pas. L’école est un bon indicateur des inégalités sociales et économiques. Le public. Les élèves. Les familles. Je constate. Le taux d’élèves, obligés de travailler non pas pour des raisons de consommation personnelle (voyage/achat personnel…) mais pour se nourrir, payer un loyer, subvenir à des besoins scolaires, augmente. Oui. Parce que les familles ne suivent plus ou pas. Parce qu’on a été prié de partir. Une bouche en moins à nourrir. Les frais scolaires sont plus compliqués à régler. L’hygiène est parfois à déplorer. Pas tous les élèves. Certaines catégories. Là où il y a 10 ans, c’était confiné à quelques exceptions, aujourd’hui, cela s’étend. Doucement. Inexorablement. A la lumière du modèle Indien, Chinois. A la mesure du taux de pauvreté allemand. Bien entendu, le taux de chômage descend. Il suffit d’exclure. Un peu comme si certaines écoles annonçaient que leurs taux d’échecs en 6ème étaient quasi nul avec fierté, alors qu’elles ont simplement « liquidé » les élèves qui ont plus de difficultés ou qui ne correspondaient pas à leurs moules. Image évidemment. On ne fait pas cela chez nous, voyons…
Ce modèle se targue de parler du « travail », de « modernité ». Si les bidonvilles indiens, la corvéabilité des marcheurs de souffre indonésien ou les pupilles des entreprises chinoises sont devenus la norme sociale du travail et de la modernité, il y a véritablement quelque chose qui ne tourne pas rond. Sauf à penser que l’objectif de l’UE, des décideurs politiques sociaux-démocrates ne portent pas sur le bien-être et l’épanouissement des individus mais uniquement sur l’avilissement du peuple par deux notions : celle de productivisme et de flexibilité pour le bien être de quelques-uns.
Aujourd’hui, on nous demande d’être subordonnés au marché, et à la flexibilité et au productivisme acharné qui va avec. Ce n’est pas le travail. Un artisan ne produit pas à la chaîne (et j’utilise le terme produire et non travailler). Il travaille son objet. Il peaufine. Il ennoblit. Il utilise des matériaux durables. Il tient compte des éléments de saison. De sa durabilité. L’artisan n’est pas moderne, mais il bosse pourtant. Beaucoup. Enormément. Il utilise les nouvelles technologies aussi. Dans une utilisation de production bienveillante. Je sais. Image d’Épinal. Sans doute. Il faut trouver des raisons d’espérer mon bon monsieur…
Récemment, j’ai regardé mes enfants. Je me suis dit que si cela continuait comme cela, le petit dernier qui a 3 ans, il va finir par connaître le retour du travail des enfants dans les usines. Sous conditions. Style contrat d’apprentissage. Avec main d’œuvre finalement à bas coûts. Et on trouvera cela bien. « Ils travaillent au moins… ». C’est un modèle, apprécié apparemment. Suicidez-vous, la vie est morte…