Ces derniers temps, la musique et le cinéma sont les seuls à parvenir à remplir les vides face aux questions auxquelles notre société me confronte. Journalistes, analystes, érudits, racoleurs, même les plus doués ou les plus avertis ne parviennent plus à me toucher, à m’interpeller, comme si ils avaient perdu ce qui fait toute la différence : Le désir d’humanité et de construire le bien commun. Le supplément d’âme. La perspective. Le souffle.
Comment aborder l’accueil des réfugiés ? Se plonger dans cette chanson de Springsteen, « The Ghost of Tom Joad ». 1995. J’en ai déjà parlé. Mais aussi dans cette chanson coup de poing de Clarika, « Bien mérité », 2009. En quelques mots, elle nous confronte à nos raisonnements les plus stupides quant au fait que nous sommes européens, syriens, hongrois ou je ne sais quoi encore. La mélodie. Sa voix. Sa conviction. C’est cela la différence. La vie. Derrière les mots, il y a la vie.
La réussite sociale, celle de Charles Michel, de Nicolas Sarkozy, des objets, des gloires éphémères au gré de nos passages plus ou moins réussis sur les réseaux, versus l’endettement de plus en plus prégnant des gens, des taux de pauvreté qui explosent et de l’absence de perspective générale. Et je me plonge dans « Château Rouge » d’Abd Al Malik. Chronique urbaine de la solitude. Chanson de 2010, qui aurait pu être écrite en 1995 et en 2015. C’est surtout cela qui fait mal.
Les errements de nos gouvernants. Jacqueline Galant. C’est facile. Je sais. Mais bon, contrairement à ce que l’opinion publique pense, nos enfants regardent. Nos adolescents jugent. Ils ne comprennent peut être pas tous les éléments, les paramètres de la politique politicienne. Mais ils « captent » qu’il y a « embrouille » et que là où tu seras arrêté parce que tu as fumé un peu trop de cannabis, tu as une immunité pour des marchés en centaines de milliers d’euros, de l’argent public. Le tien, le mien. Ils ne suivent pas au quotidien les turpitudes politiciennes. Mais ils ne sont pas idiots. Ils vivent au sein de notre société. Ils ne sont pas à côté. Ils sont dedans. La politique, ils comprennent. La gestion publique. Ils captent. Se plonger, je disais. Dans les œuvres cinématographiques. A défaut d’une presse d’opinion qui ose mettre les injonctions paradoxales en évidence, qui ose appuyer plus durement sur ces faits. Patrick Dewaere. « Le juge Fayard dit le shérif ». 1977. « Mille milliards de dollars ». 1982. Cela fait loin la référence. Je sais. J’exagère. La comparaison est trop forte. Mais le sentiment est là. Puis, l’œuvre parle. Elle donne à penser. Elle te prend aux tripes.
Alors face à tout cela, je pense à mes enfants, mes amies et amis, ma famille, les gens que je rencontre soit via ma profession d’enseignant, soit via mon activité en tant que sociologue et je me plonge dans cette chanson merveilleuse des Innocents, « Un homme extraordinaire », 1993, me disant que face à l’indigence de certains médias, de certains politiques, de l’évolution vers plus d’individualisme exacerbé, portant sur un bonheur réduit à notre propre singularité, je partage, je rencontre des individus, des acteurs, des personnalités portées vers l’autre, vers le développement d’une société chaleureuse, et même si je prends des ruelles de traverse, il y a des portes qui s’ouvrent pour m‘accueillir quand il fait froid, quand j’ai faim, quand j’ai perdu mes bagages, quand j’ai envie de rire, et de m’asseoir autour d’un café.
Ces quelques lignes sont pour vous… ce supplément d’âme qui porte encore.