Société de la maltraitance…

Société de la maltraitance. Le mot est lâché. Société dans une acceptation globale, mondiale. Seul constat à faire. Ce monde, c’est la maltraitance. Je sais. Je vais encore être pessimiste. Pas beaucoup le choix non plus finalement. Je sais. J’en ai aussi. Beaucoup d’ailleurs. Du bonheur. Des rires avec des ami-es. Des joies avec les enfants. Des émotions avec les livres, les films, les musiques, les concerts, le sport. La satisfaction du travail bien fait. Parfois. Des actions de solidarité à gauche ou à droite. Plus souvent à gauche d’ailleurs…

C’est personnel cela. Juste ma vie. Rien de plus. Rien de moins. Une goutte d’eau. Mais l’océan est monstrueux. Il est rempli d’avidité, d’oisiveté, de violences physiques, psychologiques, d’inégalités, d’absence de justice sociale, de néant aussi…
Regarde. Les homosexuels qu’on rafle en Egypte ou qu’on stigmatise à Madrid. Ce n’est pas si loin. Les 1000 coups de fouet pour Raif Badawi en Arabie Saoudite. La liberté d’expression. La guerre en Ukraine. Les étudiants mexicains. Boko Haram. L’excision. Les conditions de vie dans les prisons, celles d’ici, juste chez nous. Les conditions de vie dans les bidonvilles de Calcutta et d’ailleurs. Les viols. Les conditions de vie de nos aînés, ici ou ailleurs. Ici et ailleurs. Les inégalités. Les enfants soldats. Les enfants prostitués. Les enfants négligés. La violence à la terre. Le déracinement. Total. Le massacre. Exploiter. Détruire. Ne pas préserver. Enfin, si, pour l’exploiter. La violence psychologique. Celle du travail. Celle de la pauvreté. Celle du travail encore. Les cadences. Pour tenir face aux coûts de ceux d’en face. Un ennemi alors ? Insidieusement. Celles des chiffres. La croissance. La productivité. Le PIB. La dette. Celle qui définit finalement qu’un peuple souverain n’est rien puisque des organismes non élus, avec des individus non élus ou élus ailleurs vous disent « couche-toi au panier, petit ». Le cynisme. Un saut d’index. Mais dans un sens. Des personnes en recherche d’emplois stigmatisés jusqu’à plus soif. Ne t’occupe plus de tes proches malades, en souffrance… Cherche le chien. Cherche. Parce que finalement tu n’es que cela… Des millions. En Suisse. Au Luxembourg. Des astuces fiscales avec la bénédiction de nos gouvernements. La croissance. Cache sexe pratique. Mais reste calme. La violence d’un modèle. De la précarité. Pour certains. Toujours déjà présente. Qui s’approche. Lentement. Au gré d’emploi avec des statuts et des revenus miséreux. Mais un emploi voyons, le chien… de quoi te plains-tu… Retourne au coin. Tu dois être vaillant pour demain. L’ordre économique veille sur toi. Te regarde. T’observe.

Société de la maltraitance. Depuis toujours en fait. Guerres mondiales. Colonisation. Esclaves. Argent. Exploiter la terre, les hommes, les enfants, les femmes. Exploiter la peur, celle de la précarité, de la misère. Les religions, du moins celles et ceux qui se sont déclarés comme tel. Violence faite aux homosexuels, lesbiennes. Violence faite aux divorcés. Aux remariés. Aux déviants, monsieur. De l’ordre.

Je cherche… Pourtant des réponses sont possibles. Des femmes et des hommes proposent déjà d’autres voies. Des femmes et des hommes développent chaque jour des projets, des actions, des analyses qui tiennent la société debout, bien plus que les bourses ou autres FMI. Sans eux, cela pèterait. D’ailleurs finalement, les assistants sociaux, les psychologues, les infirmières et infirmiers, les coordinateurs sociaux et de projets, les animateurs et animatrices, les enseignantes et enseignants,… de Belgique et d’ailleurs, les piliers de la cohésion sociale de notre société ne devraient-ils pas s’arrêter de travailler pour rendre réel aux yeux du monde l’état dans lequel ils se trouvent ?

L’illusion nous a été donnée que le système démocratique permet à des individus de nous représenter. Cela fait mal… Je sais. Tu vas me dire que le politique n’a plus rien à dire dans un monde qui est en fait aux mains de l’économie. (Mais qui est cette économie, ce marché d’ailleurs… ? quelles élections pour nous dicter le chemin ? je cherche…)En fait, je ne crois pas. Au contraire, ils ont des armes. Lois, décrets, ordonnances, traités,… ces textes changent le monde, tant au niveau global que local. Si il n’y pas ce traité européen concernant la question des déficits publics, il n’y a pas ces politiques d’austérité et il y a la possibilité d’investir massivement dans des politiques sociales. S’il n’y a pas de lois permettant le saut d’index, il y a toujours alors la possibilité de ne pas être trop impacté par la hausse des prix, et de pouvoir continuer à vivre…. Au niveau européen et mondial, la possibilité pourrait exister de développer un projet global d’harmonie des conditions de travail et des salaires, de développer une concordance fiscale. Possibilité de mettre en place des sanctions réelles vis-à-vis des pays qui ne respectent pas les droits de l’Homme, qui ne respectent pas la liberté de l’orientation sexuelle, qui permettent le travail des enfants, qui imposent des conditions avilissantes de travail… C’est entre leurs mains… Quoi qu’ils en disent… je sais… « la réalité géopolitique et économique, tu es naïf»… mais justement, c’est ce que nous demandons… un monde réel, avec de la justice sociale, de l’étique et de l’équité au cœur de leur travail…

Toutes ces choses sont possibles. C’est une question de choix politique. De sens de l’action politique. J’ai la naïveté de croire au sens profond de la politique comme action de développement du bien commun et de la justice sociale. Permettre la construction d’un devenir collectif et individuel où l’économie ne se sert pas des Hommes mais où la centralité de l’action politique est de développer les conditions d’un monde juste socialement.

J’ai la candeur de croire aussi qu’il est temps de changer. Changer de centralité d’abord pour nos sociétés. Ce n’est pas le travail qui doit être au centre de la construction de nos vies mais simplement la possibilité de vivre dans des espaces qui permettent à chacun de se développer, où la culture, le sport, l’échange, la découverte des autres, de soi sont au cœur de nos pratiques, de nos vies. Changer de modèle de la représentation politique aussi. On ne peut plus se suffire d’une représentation par des élu-es qui pensent plus souvent à être élus à nouveau, pas nécessairement par goût du pouvoir mais juste parce que le système l’impose. Limiter les mandats. Sans exception. Aussi non l’exception finit par être la règle. Créer des assemblées complémentaires sur d’autres bases de représentativité. Relisez David Van Reybrouck.

Alors vous là-bas, au cœur des décisions politiques, si nos attentes sont trop lourdes, si nos exigences sont un fardeau, si notre détresse n’a pas de sens, si nos colères ne vous touchent pas, si la justice sociale est absente de vos agendas, si les possibilités de construire autre chose de plus harmonieux vous rebutent … abandonnez et laissez nous, passez à d’autres voies, plus cyniques, plus mercantiles… laissez la place à d’autres, plus ouverts, plus à l’écoute, moteurs de changement positifs… nous sommes fatigués… juste fatigués… de ce qui est là, partout…