21 Janvier 2024

[Parenthèse 28… ]

{ Sa main n’avait pas encore réussi à attraper la sienne. Quelques centimètres les séparaient. La douceur et la chaleur de leurs peaux n’avaient pas encore fusionné. Dans le silence des rues enneigées, l’alcôve s’imprégnait simplement de la voix de Sting, de cet album de 1991 qu’il chérit tant, permettant à la respiration de se calmer avant de s’embraser.

Les vêtements épars, elle dépose un baiser sur ses lèvres. Endormi, il esquisse un sourire. Ses cheveux tombent délicatement sur son épaule. Il frémit. Ils n’ont pas vraiment idée de l’heure qu’il peut être. Ils ne savent pas non plus si le monde a cessé de s’entretuer, si les voitures ont arrêté de s’entrechoquer, si par ailleurs, les extrémistes, politiques et religieux, ne se seraient pas étouffés dans les hauteurs de neige qui étaient tombées.

« Cigarettes after sex » égrène sa mélancolie lunaire pendant qu’un capuccino se dépose délicatement sur la table de chevet. Quelques volutes s’échappent. Ils aimeraient que le temps se fige. En même temps, c’est parce qu’il file qu’ils en ont si bien joui. Du moins, le pensent-ils. Dehors, la nuit est tombée définitivement. Le froid polaire laisse le blanc manteau se reposer, plus un pas ne viendra le chahuter. 

Il décide de s’habiller. Elle le regarde se mouvoir. Il sent son regard. Doucement, il enfile un t-shirt, son corps un peu emprunté. Timidement, il semble presque s’excuser de sa lenteur. Elle n’en a cure. Elle le voit tel qu’il est, et c’est amplement suffisant. Il griffonne quelque chose sur un bout de papier. Percute une paire de chaussures en se retournant pour le lui donner. Il l’embrasse, en lui serrant la main, leurs bagues se percutent. Avec son doigt, il appose doucement sa peau sur quelques parties de son tatouage. Elle ouvre le bout de papier. « Anch’io ». Elle frémit. Les codes amoureux ne regardent que celles et ceux qui s’aiment. 

Sur les enceintes de la platine qui tourne, « High Hopes » de Pink Floyd se marie aux effluves des pommes de terre et des oignons, qui eux-mêmes se délectent du fromage fondu et des lardons. Les plus attentifs auront déjà entendu le bruit sec du bouchon sautant de la bouteille qui venait d’être ouverte. Le tintement des verres indiquait simplement qu’ils avaient décidé de jouir de ces moments quotidiens que la vie leur offrait à présent. 

Tard dans la nuit, quand la voix d’Eddie Vedder s’est tue au son de « Pendulum », elle s’était approchée encore plus près de lui, fusionnant leurs corps dans un dernier mouvement puissant. Il serra sa main dans la sienne. A ce moment-là, ils ne savaient pas. La vie s’imprégnait, traçant sa voie, comme elle avait décidé depuis toujours pour ces deux âmes là…}

[Prenez infiniment soin de vous…et de ceux que vous aimez… ]